La France affronte ce mercredi l’Allemagne en demi-finale de l’Euro 2022: une bonne nouvelle pour le football féminin français, qui souffre encore d’un gros retard vis à vis du football masculin mais aussi de ses voisins européens.

Juste avant la Coupe du monde féminine 2019, organisée en France, Noël Le Graët espérait profiter de l’engouement pour voir le nombre de licenciées grimper en flèche et atteindre les 300.000 (179.000 en 2019). Mais le président de la FFF a vite déchanté, puisqu’en juin 2022, on dénombre 209.692 licenciées (sur 2,1 millions au total), dont 168.789 joueuses.

Des ambitions en nombre de licenciées

Une première défaite pour « NLG » suivie d’un nouveau coup du sort, avec l’apparition du Covid-19, ponctuée de deux saisons tronquées pour les championnats amateurs. Mais la FFF voit pourtant le verre à moitié plein. La Fédération communique sur une hausse de « 16 % par rapport à la saison dernière ». « Jamais la FFF n’a enregistré autant de licenciées », assène-t-elle, en mettant en avant « le plan de féminisation impulsé en 2012 par le président Noël Le Graët », qui « a permis de multiplier par deux le nombre de filles ou femmes licenciées (moins de 90.000 en 2010-2011). »

>>> le live-texte de la demi-finale de l’Euro Allemagne-France

Dans les colonnes de Ouest France, le président de la FFF a récemment évoqué un nouvel objectif, en voulant atteindre la barre symbolique des 250.000 licenciées en 2024. Par rapport aux ‘concurrents’, la France se situe derrière l’Allemagne (210.000 licenciées en 2021), mais devant l’Angleterre (121.000 en 2019) ou les Pays-Bas (162.000 en 2019).

Une vision des choses qui ne plaît pas forcément à tout le monde. Il y a quelques semaines, alors que la FFF annonçait se porter candidate pour l’organisation de l’Euro 2025, Ada Hegerberg est montée au créneau: « Organiser des compétitions internationales, c’est bien. S’investir dans notre championnat c’est mieux, a lâché la joueuse des Fenottes dans un message rédigé sur Twitter. On est à la ramasse et la CDM 2019 n’a eu aucun impact. »

Un gros retard sur les infrastructures

En France, les 12 formations de D1 Arkema ne bénéficient pas des mêmes conditions de travail. Les équipes rattachées aux clubs professionnels s’appuient sur de meilleures conditions que les sections 100% féminines, alors que deux clubs amateurs (Issy et Fleury) complètent le tableau d’un championnat non professionnel.

Une différence qui s’étire au niveau inférieur, comme le témoignait l’équipe d’Yzeure avant sa finale de Coupe de France contre le PSG. « On a des conditions d’entraînement médiocres. On n’a pas de moyens pour avoir une structure professionnelle qui faciliterait la récupération. Nous avons seulement trois joueuses sous contrat fédéral », expliquait Ophélie Meilleroux à RMC Sport.

Un constat partagé par Sonia Bompastor, l’entraîneure de l’OL, au micro de RMC Sport. « Là où il faut qu’on se réveille, c’est surtout au niveau de la fédération. J’étais au match entre Barcelone et l’Atlético et il y a une vraie différence culturelle. Là-dessus, on a encore beaucoup de travail. Il faut améliorer les infrastructures, les stades, les conditions de retransmission à la TV, indique celle qui a déjà remporté deux fois la Ligue des champions féminine en tant que joueuse. La Fédération doit avancer sur pas mal de sujets: la formation dans les clubs, les championnats de jeunes pour qu’elles puissent jouer dans des championnats qui leur permettent de s’aguerrir au haut niveau. Il y a plusieurs points comme ça qu’il faut vite travailler parce que sinon, on va être vite dépassés et ce serait dommage pour le football féminin français. Il y a une urgence, je tire la sonnette d’alarme. »

La FFF a augmenté les aides et mise sur des pôles espoirs

De son côté, Noël Le Graët a rappelé « qu’une commission de haut niveau féminin » avait été mise en place « pour optimiser la compétitivité des clubs ». « Beaucoup de moyens sont mis sur la structuration et la formation. Même si la FFF n’a pas vocation à subventionner à 100 % les sections féminines des clubs, elle a augmenté sensiblement ses aides. Nous avons alloué une aide supplémentaire cette saison de 50.000 € par club de D1 Arkema. Un nouveau financement du même ordre est en cours. On a également revalorisé les dotations pour la Coupe de France féminine. »

Au niveau de la formation, la Fédération Française a mis en place des pôles espoirs 100% féminin, comme c’est le cas pour les garçons. En revanche, il n’existe pas de centre de formation reconnu par l’État. Aux quatre coins de l’Hexagone, huit structures ont vu le jour (contre 16 pour les garçons) à Blagnac, Clairefontaine, Liévin, Lyon, Mérignac, Rennes, Strasbourg et Tours. À partir de la saison prochaine, ces centres vont entrer dans une nouvelle dimension puisqu’ils seront accessibles aux jeunes filles U15 (moins de 15 ans). Seules les joueuses de 16 à 18 ans y avaient accès jusque-là.

Le problème des droits TV

Autre question épineuse: celle concernant les droits TV. Détenteur des droits de la D1 Arkema depuis 2018-2019, le groupe Canal+ a signé un contrat au long cours de cinq ans pour un montant total de 6 millions d’euros (1,2 millions d’euros par saison). Il diffuse l’intégralité des rencontres sur ses chaînes (deux matches sur Canal+ Sport et quatre sur Foot+). « Les PSG-OL en prime time attirent en moyenne 500.000 téléspectateurs. Une journée classique, sans affiche, de D1 Arkema rassemble entre 50.000 et 100.000 téléspectateurs cumulés en 2019″, affirmait Thierry Cheleman, directeur des sports du groupe Canal+. Pourtant, les droits TV restent encore relativement modestes en France, grevant les capacités d’investissement potentiel des clubs.

Ce qui n’est pas le cas en Angleterre, puisque Sky Sports et la BBC ont signé un accord en 2021, garantissant la diffusion de 66 matchs du championnat anglais par saison pour un montant record d’environ 7 millions de livres (environ 8,1 millions d’euros) par an. À cela s’ajoute un contrat de sponsoring (signé en 2019 par la banque Barclays avec la Women’s Super League pour une somme supérieure à 11,5 millions d’euros pour les trois prochaines saisons) qui donne au football féminin anglais une surface financière bien supérieure à celle de son homologue français. La D1 ne peut pas compter sur le naming Arkema pour renflouer les caisses, puisque le sponsor pèse 1,2 million d’euros par saison.

Dans les tribunes, le succès tarde aussi à se faire ressentir. Si le PSG a battu des records en Ligue des champions pour une équipe française (43.254 personnes au Parc des Princes face à l’OL en demi-finale et 27.000 face au Bayern au tour précédent), le chiffre est très loin du record absolu battu par les féminines du Barça, qui ont attiré 91.648 fans au Camp Nou pour la rencontre face à Wolfsburg. En championnat, le record est toujours détenu par l’OL, toujours face au PSG, en novembre 2019 avec 30.661 spectateurs au Groupama Stadium. En dehors des affiches prestigieuses face aux deux cadors de la D1, il est difficile d’attirer du monde dans les travées.

La disparité salariale

Les disparités s’observent également au niveau des salaires, où l’OL et le PSG font face au reste du monde. En mars dernier, L’Equipe évaluait le salaire moyen mensuel brut d’une joueuse à 12.000 euros à l’OL et à 9.000 euros au PSG, mais à 2.000 euros ou moins pour une sociétaire de sept des 12 équipes de l’élite. Il est important de noter que certaines joueuses ont un contrat fédéral amélioré (il n’y a pas de contrat professionnel dans le football féminin, ndlr), tandis que d’autres n’ont aucun contrat de travail et ont une autre activité à côté pour subvenir à leurs besoins.

Pour essayer de remédier à de tels écarts, l’assemblée générale de la FFF a validé la nouvelle pyramide des championnats nationaux féminins. Oubliez l’hypothèse d’un championnat à dix clubs, qui n’avait pas plu à grand monde. Si aucun changement n’est prévu pour la D1, qui reste à 12 clubs (avec deux descentes), la D2 va connaître un grand changement, et non des moindres. Si le deuxième échelon comporte jusqu’à présent deux poules de 12 équipes, il y aura une poule unique dans deux ans, afin de créer une D3 avec deux poules de 12 équipes.

La saison prochaine s’annonce donc très ardue en D2, puisque les six équipes les moins bien classées dans les deux groupes (soit douze formations) seront reversées dans cette future D3 à l’issue de l’exercice 2022-2023. Le resserrement de la D2 se poursuit, après la réduction du championnat à deux groupes en 2016. Inversement: douze clubs de Régional 1 seront promus en D3 pour la saison 2023-2024. La nouvelle troisième division sera donc composée de 24 équipes, réparties en deux groupes de douze. Un format qui reprend celui actuellement en vigueur en D2. Cette troisième division sera notamment accessible aux équipes réserves des clubs de D1 et « possédant un centre de formation agréé ».

Une fois la saison transitoire passée, il y aura deux montées et descentes de la D1 vers la D2 et de la D2 vers la D3. Pour les équipes de Régional 1 qui veulent accéder au troisième échelon, il faudra passer par une phase d’accession de deux tours afin de déterminer les six équipes qui seront promues en D3, à l’image de ce qui est actuellement organisé pour passer de la R1 à la D2. Une demi-finale des Bleues ne sera peut-être pas suffisante pour enclencher un gros coup d’accélérateur. Un titre en revanche pourrait l’être…



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Pied droit en or, pas de grigri, pas de chichi, un crochet une frappe et nous fermons le jeu, catenaccio :)