Les inspecteurs en charge de l’audit à la Fédération Française de football remettent ce lundi, aux différentes parties prenantes, le document commandé par le ministère des Sports au mois de septembre. Les protagonistes auront dix jours pour apporter des commentaires afin de remplir cette partie « contradictoire ». Ce rapport est très attendu et pourrait avoir de lourdes conséquences sur la première fédération sportive de France. En coulisses, dans tous les camps, se prépare la riposte médiatique.

Il est cerné mais joue encore la montre. Ses vacances en Martinique n’auront pas eu la peau des dossiers, des rumeurs et des bruits médiatiques à son sujet. Depuis sa sortie totalement lunaire sur l’antenne de RMC début janvier, Noël Le Graët traverse une période de très fortes turbulences. Sa chute est inéluctable, reste à en connaître la date. En poste depuis 2011, le Breton de 81 ans s’accroche encore pour quelques jours à son siège. Depuis le début du mois de janvier, la pression est tellement forte que certains de ses proches sont inquiets concernant son état de santé. 

Le rendu de l’audit aux différentes parties prenantes est prévu pour ce lundi par courrier et par voie électronique. Les inspecteurs en charge de cette enquête devront attendre une dizaine de jours afin de prendre connaissance des observations de Noël Le Graët, Florence Hardouin et des autres parties concernées. Le rendu final est donc attendu autour du 15 février. Dès la révélation de cet audit final, les grandes manœuvres au sein de la FFF pourront commencer.

Après l’audit, un COMEX plus offensif pour pousser Le Graët à la démission?

Après l’étude de cet audit, selon nos informations, des membres du COMEX vont essayer d’amener Noël Le Graët à démissionner lors du prochain comité exécutif de la Fédération, annoncé pour le 9 février (il pourrait être décalé en raison du rendu de l’audit, ndlr). Le rapport sera difficile pour le président de la FFF (mis en retrait) et sa directrice générale, Florence Hardouin. « NLG » a toujours promis de démissionner si le rapport est accablant. Depuis quelques heures, certains médias annoncent qu’il est désormais prêt à quitter son poste… mais pas à n’importe quel prix. Globalement, la famille a pris conscience qu’il devait arrêter. 

Sans cette « judiciarisation » de l’audit, Noël Le Graët pouvait garder un infime espoir d’une sortie par le haut. Le déclenchement de l’article 40 par les inspecteurs de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche a été le coup de grâce. Le dirigeant breton nie l’ensemble des faits qui lui sont reprochés. D’après nos informations, l’IGESR a d’abord émis une note au parquet de Paris pour décrire les faits susceptibles d’être répréhensibles dans les auditions qu’ils ont menées depuis plusieurs semaines. Dans un deuxième temps, les inspecteurs ont apporté les témoignages afin d’étayer les faits reprochés. Une source judiciaire précise que cette ouverture d’enquête concerne la FFF dans sa globalité, les enquêteurs ne sont pas cantonnés au nom de Noël Le Graët dans leurs investigations.

Toujours selon nos informations, le parquet a ouvert l’enquête du chef de « harcèlement sexuel et moral », en estimant que les outrages sexistes ont pu être répétés et qu’en l’espèce, ils constituent donc du harcèlement. Le but pour les magistrats étant désormais de voir s’il a eu un « système de harcèlement moral et sexuel mis en place dans le cadre du travail ». 

Depuis plusieurs jours, la défense du dirigeant prépare sa contre-attaque. Les fuites dans la presse, les témoignages ou encore les sorties à répétition de la ministre des Sports agacent. Dans un communiqué transmis à BFMTV par ses deux avocats, Noël Le Graët avait démenti « toutes les accusations pénales » le visant. Il avait dénoncé « les annonces répétées par voie de presse qui interviennent » alors que l’audit n’a pas encore livré ses conclusions. Le signalement émis par les inspecteurs le 13 janvier dernier est aussi incompris dans le clan Le Graët. Selon le président de la FFF, le 10 janvier, l’inspecteur en charge de l’audit aurait très clairement affirmé qu’il n’y a rien dans le dossier concernant d’éventuelles charges pénales. Le clan du Breton s’interroge comment trois jours plus tard l’IGESR émet un signalement à la justice. Sauf qu’entre temps, le jeudi, Sonia Souid a témoigné devant les enquêteurs en charge du dossier. Un témoignage qu’elle avait déjà dévoilé le lundi 9 janvier sur l’antenne de BFMTV. Ce récit avait particulièrement heurté les membres du comité exécutif de la Fédération.

Un nouvel audit sur les finances de la FFF?

Un audit peut en cacher un autre. Que ça soit en privé ou devant les caméras, les dirigeants de la Fédération se vantent de la bonne santé financière de l’instance. L’année dernière, les recettes de l’instance ont atteint un record: 274 millions d’euros. Sauf que quelques éléments vont demander des investigations plus poussées dans les prochains mois. L’audit réalisé à la FFF ces dernières semaines avait comme principale mission de faire un point sur le pilotage de l’instance (le management et les accusations de violences sexuelles dévoilées par nos confrères de So Foot). Il y a quelques jours, la ministre des Sports avait annoncé lors d’un point presse l’élargissement du périmètre d’action des inspecteurs: « Vu les investigations en cours et les constats qui sont d’ores et déjà dressés par la mission, nous avons pris la décision d’ouvrir un autre volet dans cette mission qui aura trait aux enjeux de ressources humaines, aux aspects budgétaires et financiers ».

Les inspecteurs de l’IGESR évoqueront ce sujet dans leur audit remis ce lundi. Sauf que ces fonctionnaires ne disposent pas de compétences assez développées dans le domaine financier pour passer en revue l’ensemble des agissements de la FFF. D’après nos informations, un nouvel audit devrait être demandé dans les prochaines semaines pour faire toute la lumière sur la gestion financière de la FFF ces dernières années. La Cour des Comptes avait réalisé un rapport sur la gestion de la Fédération aux 2,1 millions de licenciés en 2017.

Les employés n’oublient pas Florence Hardouin

Le climat était déjà tendu depuis plusieurs mois à la Fédération. Ces dernières semaines, « c’est comme dans une série, une belle guerre des clans », confie un employé du Boulevard de Grenelle. L’audit réalisé par les inspecteurs de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche est très attendu « pour mettre en lumière un mode de gestion totalement dépassé ». Les salariés ont été nombreux à témoigner devant les enquêteurs. « On attend avec impatience les révélations de cet audit, j’espère qu’il sera à la hauteur, explique un cadre de la 3F. Alors oui, depuis plusieurs semaines on tape sur Le Graët, à juste titre, mais on souhaite aussi voir ce que cet audit réserve concernant la gestion humaine de Florence Hardouin. Un licenciement c’est difficile à vivre, elle est en train de vivre ce qu’elle a fait à plusieurs de nos collègues. » D’après nos informations, Florence Hardouin sera reçu à la FFF pour un entretien préalable à son licenciement à la fin du mois de février.

Le climat est délétère. Certains employés s’étonnent qu’un seul signalement ait été réalisé par l’inspection en charge de l’audit. D’autres se demandent si l’inspection du travail ne pourrait pas intervenir dans les prochaines semaines. La prise de parole de Philippe Diallo, le jeudi après sa nomination, n’avait pas du tout rassuré les 300 employés de la FFF. D’une manière générale, les employés n’ont qu’une pensée en tête: quitter la FFF le plus rapidement possible. Certains demandent des conseils à des salariés déjà partis, d’autres scrutent les offres d’emplois. Ces dysfonctionnements au sein de la Fédération avaient, pour la plupart, été pointé du doigt dans un audit réalisé en septembre 2020, et dévoilé par nos confrères du Monde, concernant la gouvernance de la FFF. Dernièrement dans Le Monde, Florence Hardouin s’est dite victime devant les enquêteurs de « harcèlement moral et sexuel ».

Et maintenant?

En salle, les Ligues et les districts patientent. En cuisine, les couteaux s’aiguisent, ils sont nombreux à vouloir mettre leur menu à la carte de la FFF. Au sein du Comité Exécutif de l’instance, personne ne veut suivre « NLG » dans sa chute. En revanche, un membre du comité reprend la petite phrase de Vincent Labrune: « Le statu-quo ne peut être une solution pour la FFF ». Une organisation plus démocratique et collégiale apparait comme une solution à court terme. L’idée pourrait être de poursuivre avec Philippe Diallo à la tête de la Fédération, jusqu’à la fin du mandat actuel en 2024. Mais l’organisation doit changer. Une « démocratisation » du Comex est envisagée. 

Une mission précise pour chaque membre, un pour les clubs amateurs, un autre pour les pros et l’équipe de France… Cette idée, portée par un membre du Comex, peut tenir la route à une seule condition: tout le monde doit rester à sa place et ne pas jouer sa carte personnelle. Une organisation plus collégiale car certains n’ont toujours pas digéré les choix sans concertation de Noël Le Graët sur la prolongation de Didier Deschamps à la tête des Bleus ou celle de Corinne Diacre après l’Euro. En coulisses, un homme aura aussi son mot à dire: Vincent Labrune. Le président de la LFP est membre de droit du Comex sans ambition électorale mais son avis compte. Ce dernier souhaite une vraie professionnalisation de la première Fédération sportive de France. Un profil proche du monde professionnel apparait donc comme la meilleure solution. Reste à convaincre le monde amateur.

Quel profil pour prendre la tête de la FFF?

Si, comme l’attend la ministre des Sports, le rapport d’audit est effectivement accablant pour Le Graët qui démissionnera, Diallo prolongera son intérim jusqu’à la prochaine AG de la FFF le 10 juin 2023. La veille de cette AG, le comité exécutif choisira en son sein un candidat pour la présidence jusqu’à la fin du mandat actuel, soit jusqu’en 2024. Au-delà de Philippe Diallo qui pourrait vouloir prolonger encore son intérim plusieurs noms peuvent vouloir prendre ce siège très convoité.

Marc Keller : C’était le favori du roi pour prendre la tête de la Fédération Française de Football en 2024. Le timing pour cet Assemblée générale du mois de juin est trop juste pour lui. Strasbourg n’est pas au mieux en Ligue 1, vendre son club dans cette situation et en quelques semaines est impossible. Membre du comité exécutif de la FFF depuis 2016, l’Alsacien jouera un rôle en coulisses. 

Jean-Michel Aulas : L’homme fort de l’Olympique Lyonnais est dragué par pas mal de monde depuis plusieurs semaines. Des présidents de Ligues, de districts, il peut apparaître comme le profil parfait pour prendre la tête de la 3F. Et pourtant, il répète à longueur d’interview qu’il ne souhaite pas cette place. Si Aulas veut prendre la tête de la FFF, il devra aussi accélérer son désengagement de l’OL. Il aura un rôle à jouer parce qu’il est très respecté au sein du comex.

Philippe Diallo : Depuis le 11 janvier, il pilote la Fédération Française de Football. Il est le grand favori pour terminer le mandat de Noël Le Graët, en cas de démission du Breton. Même s’il ne fait pas l’unanimité au sein du comité exécutif de la FFF, Philippe Diallo connait parfaitement les coulisses de la Fédération. Il garde l’image d’un homme de dossiers.

Jamel Sandjak : Outsider avec des ambitions. Proche du monde amateur, et ancien adversaire de Noël Le Graët, Sandjak peut jouer sa partition en cas de nouvelle élection à la FFF dans les prochains mois. Dès le mois de juin ? Avec ? Il a toujours joué la carte du respect auprès de « NLG ».

Eric Borghini : président de la Ligue Méditerranée, qui s’est révélé au grand public lors de ses prises de paroles après les comex depuis début janvier peut aussi apparaitre comme un outsider. 

Ces profils auront leur mot à dire pour la suite du mandat et de la gouvernance de l’institution car aucun n’imagine la possibilité d’une démission collective. En revanche, si le comex est forcé de partir, la liste pourrait être (beaucoup) plus importante. Reste à connaitre la date et le scénario.

Jean Rességuié, Nicolas Pelletier et Loic Briley



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